Cosa distingue una “civiltà” da una “cultura”? Jacques Le Goff ha risposto così in un’intervista a “Le Monde” del 21 gennaio 2014:
Qu’est-ce qui distingue une civilisation d’une culture ?
La civilisation repose sur la recherche et l’expression d’une valeur supérieure, contrairement à la culture qui se résume à un ensemble de coutumes et de comportements. La culture est terrestre quand la civilisation est transcendante. La beauté, la justice, l’ordre… Voilà sur quoi sont bâties les civilisations. Prenez le travail de la terre, la culture va produire de l’utile, du riz, là où la civilisation engendrera de la beauté, en créant des jardins.
En Extrême-Orient, les différences entre les civilisations chinoise et japonaise s’expriment dans la structure de leurs jardins. Le jardin chinois aime le désordre et le secret, tandis que le jardin japonais est très ordonné et octroie une place importante à l’eau. On devine leurs influences religieuses et spirituelles, bien qu’ils exposent deux rapports très différents au religieux, avec d’un côté une religion du mystère, le taoïsme chinois, et de l’autre une religion de la lumière, le shintoïsme japonais.
Mais pour prendre un exemple plus proche de nous, il existe une opposition forte entre le jardin à l’anglaise et le jardin à la française, le premier est fouillis, c’est un lieu romantique, propice à la rêverie, tandis que le second est très construit et structuré, c’est un jardin cartésien, érigé sur le terrain de la rationalité. La culture privilégie l’idée d’utilité, de sécurité et de richesse, contrairement à la civilisation, pour qui le spirituel et l’esthétique ont bien plus de valeur.
Il resto dell’intervista è QUI oppure al primo commento qui in basso.
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AGGIORNAMENTO del 2 aprile 2014:
Umberto Eco ha scritto un ricordo di Jacques Le Goff su “La Repubblica”: Quell’umanista curioso che amava le miniature più dei grandi eventi, QUI (via-Manuelaghizzoni) (o pdf). Il testo è anche tra i commenti qui in basso.
“Le Monde”, 21 gennaio 2014, QUI
JACQUES LE GOFF : « LA BEAUTE, LA JUSTICE, L’ORDRE… VOILA SUR QUOI SONT BATIES LES CIVILISATIONS »
par Nicolas Truong
Historien médiéviste de renommée internationale, auteur d’une oeuvre monumentale, Jacques Le Goff a publié Le Moyen Age et l’Argent (Perrin, 2010), A la recherche du temps sacré, Jacques de Voragine et la Légende dorée (Perrin, 2011), Le Moyen Age expliqué en images (Seuil, 2013) et, plus récemment, le 9 janvier, Faut-il vraiment découper l’histoire en tranches ? (Seuil, 224 p., 18 €).
Pourquoi parrainer la collection « Histoire & civilisations » ?
Cette collection me paraît répondre à une exigence essentielle de l’édition dans le domaine de l’histoire : mettre à la disposition d’un grand nombre de lecteurs une somme de connaissances qui, sans relever de l’érudition, est nécessaire à l’éducation de l’honnête homme d’aujourd’hui. Cela me semble d’autant plus important que, dans certains pays dont la France fait partie, l’histoire est aujourd’hui en recul dans l’enseignement. Il s’agit là d’une erreur inquiétante, car l’histoire est individuellement et collectivement nécessaire à la compréhension du monde et à notre rôle dans son fonctionnement.
Y compris l’histoire ancienne et médiévale ?
Il faut redonner de l’importance et de l’influence à la connaissance du passé antique et médiéval : notre existence vit d’héritages et ces héritages ne sont pas un simple retour nostalgique sur le passé. Ils sont et doivent être un tremplin pour l’avenir. Dans ce cadre, cette part donnée à la longue durée est capitale. Il me semble d’ailleurs que, dans la période à venir, il serait important que nous ayons des spécialistes de ce que l’on appelle aujourd’hui la préhistoire, dont je pense que, grâce en particulier à l’archéologie, on devrait découvrir de nouveaux témoignages qui permettront de mieux répondre à la question : « D’où venons-nous ? »
Les historiens peuvent apporter principalement deux choses. La première, c’est la connaissance des héritages. Si je ne crois pas qu’il y ait un sens de l’Histoire, malgré tout, l’histoire vit en partie d’héritages que nous devons connaître pour apprendre à en profiter et savoir les utiliser. D’autre part, la connaissance de l’Histoire et l’esprit historique nous forment à mieux nous servir de ce qui constitue une donnée fondamentale de notre existence individuelle et collective : le temps. Le monde et nous-mêmes, nous évoluons, nous changeons et ces mutations, c’est l’histoire qui les constitue. L’histoire en tant que matière de connaissance est ce qui permet de mettre en perspective les mutations en oeuvre à l’heure actuelle.
Qu’est-ce qui distingue une civilisation d’une culture ?
La civilisation repose sur la recherche et l’expression d’une valeur supérieure, contrairement à la culture qui se résume à un ensemble de coutumes et de comportements. La culture est terrestre quand la civilisation est transcendante. La beauté, la justice, l’ordre… Voilà sur quoi sont bâties les civilisations. Prenez le travail de la terre, la culture va produire de l’utile, du riz, là où la civilisation engendrera de la beauté, en créant des jardins.
En Extrême-Orient, les différences entre les civilisations chinoise et japonaise s’expriment dans la structure de leurs jardins. Le jardin chinois aime le désordre et le secret, tandis que le jardin japonais est très ordonné et octroie une place importante à l’eau. On devine leurs influences religieuses et spirituelles, bien qu’ils exposent deux rapports très différents au religieux, avec d’un côté une religion du mystère, le taoïsme chinois, et de l’autre une religion de la lumière, le shintoïsme japonais.
Mais pour prendre un exemple plus proche de nous, il existe une opposition forte entre le jardin à l’anglaise et le jardin à la française, le premier est fouillis, c’est un lieu romantique, propice à la rêverie, tandis que le second est très construit et structuré, c’est un jardin cartésien, érigé sur le terrain de la rationalité. La culture privilégie l’idée d’utilité, de sécurité et de richesse, contrairement à la civilisation, pour qui le spirituel et l’esthétique ont bien plus de valeur.
Comment les civilisations naissent-elles ?
Les civilisations sont humaines, ce sont donc les êtres humains ou les institutions qui en favorisent l’éclosion. Mais se pose la question du lieu : où naissent-elles ? La ville est pour moi, sans conteste, le grand foyer de la civilisation. Quant aux personnes, on peut lier la naissance de la civilisation à la volonté de puissance des individus, c’est l’appel et la contrainte qui entourent les puissants qui créent autour d’eux ce désir de rehausser leur prestige et renforcer leur domination. C’est la volonté des pharaons de survivre à la mort par le souvenir qui a donné les pyramides. Les religions sont les plus grands producteurs de civilisations. Pensez au rôle des temples dans les diverses civilisations, chez les Aztèques, les Incas, les Mayas, comme en Occident, où l’église, qui a très tôt remplacé le temple, a été un élément essentiel du passage de la civilisation antique à la civilisation médiévale, chrétienne et moderne. C’est l’ambition et la recherche de valeurs supérieures qui transforment une culture en civilisation.
« Nous autres civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles. » Comment doit-on comprendre cette phrase de Paul Valéry, écrite en 1919 ?
C’est avant tout une réaction au désastre et aux destructions de la guerre de 14-18. Il y a derrière ces mots l’idée que les monuments, les institutions et les villes peuvent subir des destructions matérielles qui emportent aussi leurs valeurs. Ce ne sont que des hypothèses, mais il est possible que certaines civilisations très anciennes de l’Amérique précolombienne ou de l’Afrique aient pu disparaître par fait de guerre. Mais dans un deuxième temps, Paul Valéry identifie civilisation et corps humain, l’idée de mort brutale et désastreuse est remplacée par celle d’extinction, de mort lente. Les civilisations pourraient disparaître parce qu’elles ne parviennent plus à maintenir une natalité capable de prolonger l’humanité qui la porte, ou de produire les biens de consommation suffisant pour perdurer. En effet, les civilisations vivent sur une terre où leur existence physique n’est pas complètement à l’abri de destructions.
Diriez-vous comme Marx qu’à chaque technique correspond une organisation sociale, et que le moulin, par exemple, symbolise la société féodale ?
Il y a du vrai dans cette phrase de Marx et on peut dire que la pensée moderne, même si elle s’est éloignée d’une application systématique et restreignante de la pensée de Marx, a été marquée par sa conception de l’importance de l’économie et de l’histoire. Toutefois, je pense qu’une création, une disparition ou une mutation de civilisation demande du temps. Il faut lier l’histoire et le développement des civilisations au déroulement du temps. Une civilisation met du temps à se créer, à évoluer, à mourir, à se transformer ou à transmettre des héritages. Dans l’histoire et la réflexion sur les civilisations, l’idée d’héritage est fondamentale. Une civilisation est souvent faite de couches ou de dons de valeurs, de traditions qui s’inscrivent dans le temps. Les hommes sont toujours des héritiers.
Il y a une notion dont on a largement abusé, c’est celle de « révolution ». Dans l’histoire de l’humanité, elles sont très rares, et hormis les révolutions française et bolchévique, je vois peu de changements aussi globaux et brutaux. Et comme François Furet, je pense que la révolution française a duré tout le XIXe siècle. La mise à feu date bien de la fin du XVIIIe siècle, mais toutes les ondes qui ont détruit le passé et fait naître une nouvelle société ont mis longtemps à produire leurs effets. De même, ce n’est pas du jour au lendemain que la révolution bolchévique a modifié l’espace russe et une partie de l’Europe de l’Est et de l’Asie.
Existe-t-il une dynamique des civilisations, comme Fernand Braudel (1902-1985) disait qu’il y avait une dynamique du capitalisme ?
La dynamique des civilisations a plusieurs sources. L’une d’elles est le besoin naturel. Le besoin d’alimentation peut engendrer une civilisation dans laquelle un aliment ou une forme de cuisine prend une valeur extrêmement importante, comme le riz ou le maïs. Mais la dynamique des civilisations repose également sur la nécessité de communiquer. Parmi les instruments essentiels des civilisations, on trouve les routes terrestres et navales. Pour la civilisation portugaise, la route maritime a été un pilier, par exemple.
Bien entendu, les besoins intellectuels et spirituels ont aussi joué un rôle fondamental. L’école a par exemple été un instrument considérable dans l’histoire des civilisations, en dispersant un savoir qui a permis et permet le maintien d’une civilisation vivante, et qui transmet également des héritages et prépare les évolutions. Le savoir didactique est au premier rang des dons civilisateurs de la Grèce antique, depuis l’école du pédagogue de village jusqu’à celle de Socrate et des grands philosophes d’Athènes. Et aujourd’hui, ce que l’on appelle « la recherche » participe de cet enrichissement de la civilisation, d’une civilisation technologique et scientifique.
La civilisation médiévale a entretenu un rapport ambigu au corps, corps tantôt renié, caché et dévalorisé, tantôt glorifié comme celui du Christ. Existe-il des tensions dynamiques à l’intérieur de l’Histoire et des civilisations ?
Oui, mais elles sont de diverses natures. La pensée chinoise nourrit une tension entre deux pôles, le ying et le yang, alors que la civilisation occidentale, elle, repose sur une tension fondamentale entre le bien et le mal. Pour les Occidentaux, cela semble aller de soi, alors que c’est une construction de l’Histoire qui a pensé que tout le territoire de la pensée et de l’action évoluait entre deux domaines opposés, en lutte quasi constante.
Personnellement, j’essaye de tendre vers un terrain neutre, mais je me suis rapidement aperçu qu’on ne demeure pas longtemps dans cette neutralité. J’aurais davantage tendance à considérer qu’il existe un certain nombre d’entre-deux qui entrent tantôt dans le domaine du bien, tantôt dans celui du mal. Et cette diversité des positions me semble être plus proche de la réalité et davantage gage de paix. Il y a dans les civilisations un globalisme qui permettrait de faire son portrait et une diversité qui s’exprimerait dans un film.
Peut-on parler de « choc des civilisations », comme l’a fait Samuel Phillips Huntington (1927-2008) ?
Il y a eu dans l’Histoire des conflits de civilisations, mais de là à les généraliser – comme cela a été fait dans une oeuvre dont on a énormément parlé –, je crois, comme beaucoup, que c’est une erreur. La période de la colonisation (XIXe-XXe siècle) a été marquée par des chocs de civilisations, tout comme dans l’Antiquité des heurts ont existé entre les Grecs et les Perses, et au Moyen Age pendant les invasions mongoles.
En revanche, contrairement à ce que l’on pense, les grandes découvertes n’ont pas joué un rôle civilisateur essentiel. Elles ont certes matérialisé une voie de communication jusqu’alors inconnue et marqué la possibilité d’innovations futures dans les pays découverts comme dans ceux qui les ont découverts et dans toutes les régions avoisinantes, mais elles n’ont pas eu l’effet à la fois inévitable, obligatoire et considérable qu’on leur prête. Certaines découvertes ne sont pas allées plus loin qu’une rencontre, d’autres ont mis beaucoup de temps à donner leur plus profond résultat : prenez la découverte de l’Amérique, elle ne devient véritablement importante qu’à la fin du XVIIIe siècle, pendant la fondation des Etats-Unis. L’Amérique du Sud pendant le XVIe siècle a vécu exactement comme l’Europe médiévale, il a fallu attendre Bolivar pour que la découverte porte ses fruits.
Selon moi, la période qui court de la fin du XVe siècle jusqu’au milieu du XVIIIe siècle est une sous-période d’un long Moyen Age, une sous-période qui a connu des nouveautés dues aux migrations alimentaires (la tomate, le maïs, etc.), mais aussi à l’expansion des métaux précieux.
Pourquoi dites-vous que la ville est le creuset des civilisations ? N’y a-t-il pas eu de civilisations rurales ?
Je n’en vois pas beaucoup. Je dois avouer que dès qu’on parle de civilisation, on trouve la ville, même lorsqu’il s’agit de civilisations anciennes. L’Egypte ancienne, les empires et royaumes du Proche-Orient, l’Empire romain, la chrétienté, l’Amérique précolombienne, l’Extrême-Orient et l’Inde antique, partout les villes ont joué un rôle essentiel. La Grèce ancienne avait Athènes, Sparte, Corinthe… et même les civilisations de Mésopotamie étaient des civilisations de la ville. Pourquoi ? Parce que la ville offre deux choses nécessaires à la création : le nombre et la proximité. C’est pour cela que parmi les piliers de la civilisation européenne, j’ai retenu l’échelle du quartier. La ville est une association de voisins.
Elle a fait naître un comportement, une institution à laquelle on n’a pas assez porté d’attention dans l’Histoire : l’artisanat. Son importance commence dès l’Antiquité. Chez les Grecs anciens et les Romains, le faber, le forgeron, est un personnage essentiel. Il fabriquait la charrue, nécessaire à l’agriculture, les fers à cheval et beaucoup d’autres outils essentiels au développement de la civilisation.
Au XIe siècle, en France, deux événements presque contemporains ont bouleversé le Moyen Age : la naissance du village, avec le rassemblement des paysans dans des agglomérations qui respectaient la même structure, avec l’église et le cimetière au centre, et les premiers mouvements communaux qui ont marqué la prise en main de leur gouvernement par les habitats, ceux qu’on appellera les bourgeois. L’installation dans les villes des frères dominicains et franciscains, dont le métier consiste à prédiquer, a renforcé la communication. La ville est devenue plus que jamais un centre de production et a ainsi achevé de posséder tous les atouts qui lui ont permis d’être un moteur.
Peut-on dire qu’il existe des civilisations « chaudes » et « froides » ?
On peut dire qu’il existe des régions plus animées et créatrices que d’autres, dans le domaine économique, artistique ou dans celui de l’enseignement. Un pays qui s’est toujours distingué dans l’Europe médiévale et qui était plus chaud que la plupart des autres de la chrétienté, c’est l’Italie, par exemple.
Quels sont les marqueurs des civilisations ?
Il faut distinguer les marqueurs existants de ceux qui ont disparu. Ceux ressuscités par les historiens, les anthropologues et les sociologues sont très divers. Ça peut être un aliment, il y a eu en Irlande une civilisation de la pomme de terre, une grande partie de l’activité de la ville tournait autour des effets de sa culture. La civilisation est quelque chose de globalisant.
Pourquoi parlez-vous d’une mondialisation dans le temps et dans l’espace ?
Le problème, c’est celui de l’espace, de l’aire géographique et des relations qu’entretiennent les espaces des civilisations entre eux. Il faut différencier trois états essentiels : le contact, l’échange et la fusion. Le contact, c’est ce qu’il s’est passé pendant les grandes découvertes, dont l’instrument a été le bateau. L’échange a eu lieu entre les pays européens et ceux découverts, se sont créés des échanges commerciaux, mais aussi intellectuels. Et puis arrivera un moment où entre les deux pays en contact et en échange s’opérera une quasi-uniformisation.
Aucune région n’a pour le moment connu cette phase, contrairement à ce que disent certains journalistes et politiciens, notamment avec leur concept d’américanisation du monde. Je crois que ce phénomène de fusion n’existe pas encore, nous sommes toujours dans une phase d’échanges, mais d’échanges inégaux.
Peut-on encore parler des civilisations ou n’en reste-t-il finalement plus qu’une seule, celle du monde globalisé ?
Nous sommes entrés dans une nouvelle période de l’Histoire, dont l’instrument principal est l’ordinateur. Nous faisons face à un instrument qui ne s’est pas encore répandu partout et qui ne l’a pas fait au même degré de saturation. Je crois que nous avons pour la première fois, mieux que le téléphone ou la télévision, un outil qui deviendra quasi universel et qui pourra tisser une civilisation numérique. Aujourd’hui, nous n’en sommes encore qu’au stade du contact, il faut patienter pour savoir s’il parviendra à faire naître une nouvelle civilisation.
“La Repubblica”, 2 aprile 2014, QUI (via-Manuelaghizzoni) (o pdf)
QUELL’UMANISTA CURIOSO CHE AMAVA LE MINIATURE PIU’ DEI GRANDI EVENTI
di Umberto Eco
È scomparso Jacques Le Goff. Aveva novant’anni, e a molti potrà sembrare un’età ragionevole, ma dopo la morte della moglie, trauma che lo aveva letteralmente sconvolto e da cui non si era mai liberato, aveva passato gli ultimi anni immobilizzato in casa, senza poter camminare, anche se la testa gli funzionava ancora benissimo e non cessava di lavorare e pubblicare, muovendosi con apparati di sostegno, senza incespicare, tra i grattacieli di libri che, non potendo essere ospitati negli scaffali, si ergevano come una dotta Manhattan nel suo appartamento minuto.
La Francia ha prodotto tanti e insigni studiosi del Medioevo, e basti pensare perla storia della filosofia a Etienne Gilson, per la storia dell’arte a Émile Mâle o a Henri Focillon, per la storiografia a Pirenne o a Duby, ma Le Goff è stato un interprete personalissimo di questa grande vocazione francese.
Nasceva nell’ambiente di Annales, la rivista fondata nel 1929 da Marc Bloch e Lucien Febvre, che aveva iniziato un nuovo approccio alla storiografia, privilegiando, rispetto alla “storia evenemenziale” (nomi, battaglie, date, trattati politici) una ricerca su tutti gli aspetti di un periodo, in particolare la vita materiale, i costumi, le strutture sociali.
Le Goff si distingueva nel solco di questa tradizione per avere veramente infranto ogni barriera tra storia degli eventi, modi di pensiero e modi di vita.Nel 1964 il suo La civiltà dell’occidente medievale ci aveva rivelato un Medioevo a tutto tondo, dalla coltivazione dei fagioli ai miracoli dell’architettura, dai modi di vita ai modi di pensiero. Voglio dire che se dovessi indicare a qualcuno il modo migliore per comprendere quella grande epoca che è stato il Medioevo, non potrei che consigliare ancora questo grande libro, anche se ha ormai cinquant’anni. Le Goff ha esplorato il Medioevo nei suoi aspetti più trascurati, la vita degli intellettuali e dei mercanti, o il meraviglioso e il quotidiano. Anche qui, se dovessi rendere conto del suo modo di fare storia, dovrei invitare il non specialista a capire meglio quei secoli non attraverso un elenco di battaglie, ma guardando le miniature dei mesi delle Très riches heures du Duc de Berry, dove si vede come i contadini sedevano intorno al fuoco, come coltivavano i campi o pascolavano i maiali, senza trascurare il gusto cromatico che si manifestava nelle vesti femminili, nelle gualdrappe, nei festini.
Ma, giocando a metà tra storia degli eventi e storia materiale, Le Goff ha scritto una monumentale San Luigi, che gli è costata anni di lavoro, e mi ricordo con che entusiasmo (se la parola è giusta per una ricerca così dolorosa) nel corso del suo lavoro intratteneva gli amici con la descrizione di come era stato bollito il corpo del re in Terrasanta, per poterne riportare le ossa in Francia. Che è un bel modo di fare storiografia, se il racconto storico deve farci davvero capire che cosa avveniva e che cosa si faceva in un tempo antico. E ho usato la parola “racconto” perché Le Goff era anche un gran raccontatore, ovvero sapeva trasformare la Storia in storie affascinanti, da letterato finissimo.
E come storico non tanto degli eventi quanto della cultura (e della filosofia e della teologia) rimane monumentale la sua opera sulla Nascita del Purgatorio, del 1981,capolavoro di erudizione e di riscoperta di testi dimenticati.
Questo studioso, che ha passato la vita all’ombra delle grandi cattedrali e passeggiando curioso per Vico degli Strami, non si limitava al lavoro di grande accademico e grande cattedratico ma, come anche i lettori di quotidiani ricordano, sapeva parlare al grande pubblico e per il grande pubblico sono stati scritti tanti suoi libri apparentemente divulgativi, ricchi di illustrazioni e di documenti bizzarri, ma che riuscivano ad essere leggibili e godibili da tutti proprio perché dietro vi stavano i risultati di lunghe ricerche e magistrale sapienza.
Le Goff partecipava attivamente anche alla vita politica del suo tempo, anche se non appariva schierato con gruppi riconoscibili. Ma vorrei ricordare la sua appassionata collaborazione alla Academie Universelle des Cultures, presieduta da Elie Wiesel, dove con Jorge Semprun e me (e cito questo episodio personale perché si era trattato di una appassionante avventura) dell’Accademia aveva stilato la Carta, una sorta di appello e programma contro ogni forma di razzismo e intolleranza.
E, visto che ho dato la stura ai ricordi personali, vorrei ricordare il suo gusto per la buona cucina, il senso dell’amicizia, il saper parlare di grandi cose sorseggiando un buon calvados. Aspetti non casuali e accessori perché ritengo che, per essere un grande studioso, occorra anche essere un grande essere umano, e giovialità e amore per la vita facevano parte della sua capacità di ridar vita al passato.
Come nessun altro storico, Jacques Le Goff, morto ieri a Parigi a 90 anni, ha modificato la nostra percezione del Medioevo e come pochi altri storici la sua opera nasce dal desiderio di innovare con sempre nuove domande e nuovi temi, allargando il «territorio dello storico» alla luce della Nouvelle histoire e,grazie a una straordinaria abilità nel comunicare con un pubblico vasto, con la parola oltre che con la scrittura. Nei suoi radiofonici Lundis de l’histoire presentò per decenni (dal 1968 in poi) i nuovi libri di storia discutendo con gli autori, sovente anche giovani. E dal suo Seminario parigino (1962-1992) lanciò temi (come la storia del riso, I riti, il tempo, il riso, 2001)che si imposero presto, anche perché accoglievano le scienze sociali (antropologia culturale, etnografia) e la storia delle immagini, allora agli inizi.
Nato a Toulon nel 1924 – suo padre, bretone, era professore di inglese e sua madre, insegnante di pianoforte –, vince nel luglio 1945 il concorso per entrare alla École Normale Supérieure. Nel 1953 è ospite a Roma della Scuola francese di Palazzo Farnese, dove inizia una tesi di dottorato sulle università medievali (che si trasformerà in una tesi sul lavoro nel Medioevo, soprattutto intellettuale). Al suo ritorno in Francia, Michel Mollat lo vuole come assistente all’università di Amiens. Nell’autunno 1959, Maurice Lombard, studioso di storia economica del mondo islamico, che Le Goff ha ammirato alla pari di Marc Bloch, lo chiama ad insegnare all’allora nascente VIe Section dell’École Pratique des Hautes Études.
Inviato più volte da Braudel a Varsavia per insegnare nell’ambito di una convenzione con quell’università, incontra e poi sposa (1961) una giovane dottoressa polacca specializzata in psichiatria infantile, Hanka, che gli darà due figli e alla cui memoria dedicherà un affettuosissimo libro di ricordi (Avec Hanka, 2008). Più tardi, nel 1968, sempre a Varsavia, assisterà alle repressioni di Gomulka e alla rottura del suo amico Bronislaw Geremek con il partito comunista.
Fin dai suoi primi due libri, sui mercanti e i banchieri (1956) e gli intellettuali (1957), poi con la sua prima grande sintesi, La civiltà dell’Occidente medievale (1964), forse la sua opera più originale, Le Goff riesce ad imporre il suo modo di intendere il Medioevo: studiarne le strutture fondamentali – la foresta, la città e così via – incrociando i vari contesti sociali con l’immaginario e il simbolico e con l’analisi di gruppi sociali visti quali figure tipologiche della società. Non la storia dei
monaci ma il monaco. Non i mercanti ma il mercante, che nel Medioevo è sempre un po’ usuraio, a causa della condanna dell’usura da parte della Chiesa ( La borsa o la vita, dall’usuraio al banchiere, 2003). La ricchezza nel Medioevo non è soltanto di questo mondo, anche se il ruolo del denaro non fa che crescere dal Mille in poi(Lo sterco del diavolo. Il denaro nel Medioevo, 2010). Studiando l’intellettuale come rappresentante di quel gruppo sociale che ha il compito di pensare e di insegnare, pur in un contesto di condanne e di censure, Le Goff apre la porta a una storia delle università più attenta al contesto sociale. È forse il suo libro più agile e vivace. Lo aiutarono frequenti conversazioni con un domenicano geniale, Marie-Dominique Chenu.
Nel 1969, Fernand Braudel lo chiama a dirigere insieme a Emmanuel Le Roy Ladurie e a Marc Ferro la prestigiosa rivista degli Annalesfondata da Marc Bloch e da Lucien Febvre. Nel 1972 viene eletto successore di Braudel alla direzione della VIe Section. Sotto la sua direzione (1975), la VIe Section si trasforma nell’ormai celebre École des Hautes Etudes en Sciences Sociales. Quando (1977) lascia la direzione dell’École esce un suo nuovo libro, il cui titolo– Per un altro Medioevo –è un programma cui aggiunge un altro concetto a lui molto caro e destinato a diffondersi, quello di un lungo Medioevo, perché molte sono le strutture dalla feudalità all’immaginario sociale, sopravvissute fino alla Rivoluzione francese.
Proprio in quegli anni di pesanti responsabilità amministrative Le Goff inizia a studiare una struttura dell’immaginario – il Purgatorio – con fortissime implicazioni di carattere sociale ed economico oltre che intellettuale e teologico. La nascita del Purgatorio (1981) diventerà uno dei suoi libri più famosi – i principali sono stati tradotti in Italia da Laterza, per cui ha diretto, dal 1993, la collana “Fare l’Europa”. Partendo da una scoperta lessicale – il fuoco purgatorio (aggettivo) di cui si parla già nei primi secoli del cristianesimo si trasforma nel corso del XII secolo in un sostantivo – lo storico francese vede nel Purgatorio una struttura positiva che accompagna l’uscita del Medioevo dal dualismo inferno-paradiso e permette all’uomo di impadronirsi del tempo dell’aldilà. In un altro famoso saggio aveva già teorizzato che il tempo dei mercanti si fosse sostituito al tempo della Chiesa (Annales, 1960, trad. 2000).
In quel XIII secolo che ha tanto studiato, il re di Francia Luigi IX incarna l’apogeo dell’Europa cristiana. Il personaggio lo affascina a tal punto da dedicargli, un po’ controcorrente, una ponderosa biografia (San Luigi, 1996).Come il mercante e l’intellettuale, anche San Luigi è visto nella sua singolarità e come figura tipologica (di sovrano medievale).
San Luigi è anche il re sofferente, ad imitazione del Cristo in croce. Come Francesco d’Assisi è nelle sue stimmate un alter Christus (San Francesco d’Assisi, 2000). Ed ecco sorgere uno spiccato interesse per la storia del corpo che Le Goff tratta come una «delle principali tensioni dell’Occidente», perché nel Medioevo il corpo è stretto tra una straordinaria valorizzazione cristiana (Incarnazione, reliquie, stimmate) e un’altrettanto forte retorica di disprezzo del mondo (Il corpo nel Medioevo, con Nicolas Truon, 2007). Il dualismo che attanaglia il corpo si attenua però dal XII secolo in poi, lasciando spazi nuovi alla medicina e alle scienze del corpo che aprono la via alla modernità. Sebbene il cristianesimo medievale condanni come errori le novità, Le Goff scorge verso la fine del Medioevo una società europea creatrice che innova e prepara la modernità che si consoliderà nell’Umanesimo (L’Europa medievale eil mondo moderno, 1994). Il Medioevo di Le Goff affascina perché realtà e immaginario si fondono pur nelle loro contraddizioni. Il suo Medioevo non è mai senza legami profondi con il tempo lungo, è sempre attento all’uomo (L’uomo medievale, 2006) ed è quindi più vicino a noi.